mardi 19 août 2008

Conclusion - V


Conclusion


Il semble donc que la vie contemplative soit la plus excellente de jure, mais peut-être inatteignable de facto. Dès lors, la solitude du sage n'est jamais totale, elle est fondamentalement intermittente. Cela s'explique, on l'a vu, par une raison des plus simples : le sage n'est qu'un homme. En approfondissant l'examen de cette impossibilité à être autosuffisant durablement, on remarque que l'essence humaine porte en elle cette excellence, mais que l'homme, fait de matière – donc en proie à la génération et à la corruption – ne peut jamais être durablement en acte. Ce que donne à penser Aristote est tout à fait original par rapport à la pensée de son temps : il y a dans l'essence humaine un appel à aller au-delà de soi, lequel est orgueilleux et à la fois vertigineux. Finalement c'est un ton de résignation, tout à fait mesuré – tout à fait grec peut-être – qui clôt cette réflexion en admettant qu'il se loge au creux de l'homme une certaine insuffisance ontologique a être pleinement ce qu'il pourrait ou devrait être. Cette solitude inaccessible marque donc la tragédie d'une actualisation inaccomplie, d'une entelecheia impossible1.


1A ce propos on retiendra la lumineuse interprétation de P.Aubenque in La prudence chez Aristote, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 1963, réed. 20023, p.83

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