mardi 15 janvier 2008

Le silence chez Michel Foucault - V



Voici la dernière partie de cette petite réflexion sur le silence chez Michel Foucault. N'hésitez pas à discuter les propos tenus. En espérant n'avoir assomer personne d'ennui...


Que voir ultimement derrière le masque du silence ? Assurément une modalité négative du discours. Un rapport de la parole avec elle-même, tant le silence existe toujours en elle, au moins comme virtualité, comme peur intrinsèque. Lorsque Foucault expliquait que le langage philosophique devait maintenant avoir à faire avec cette intrusion du silence, dans son champs, il pointait une difficulté tout à fait contemporaine. Cette dernière semble être toujours présente en cette période post-métaphysique, où la limite de la parole ne se construit que par rapport à un sujet, qui a accepté pour de bon sa finitude. Comment comprendre dès lors la voix du philosophe qui semble toujours limitée par ses propres découvertes ? Le penseur doit-il se confiner au travail interminable du commentaire, dès lors qu'aucun grand système ne peut plus se construire ? On peut supposer que son travail, est désormais d'habiter cette espace du silence, de pouvoir s'y mouvoir, sans en briser les contours. D'ors et déjà, en comprenant sa mécanique, il se tient à l'écart de son pouvoir, et ainsi se sauvegarde du mutisme. Mais il n'est pas pour autant à l'aise en ce nouveau domaine. Il ressent bien qu'à chaque parole, il peut malgré lui, dépasser l'étroite ligne. Dès lors, chaque mot proféré doit-il contenir en lui la peur de son propre anéantissement ? Il semble bien qu'il doit pour l'instant en être ainsi, mais cela fait naître une certaine prudence énonciative, cette dernière étant la compréhension que l'espace du langage comporte son pendant de néant.

Cependant les analyses de Foucault sur le champs de la littérature confère au silence l'aspect d'un principe actif au sein de le création artistique. Il faut pourtant bien se garder d'en faire le principe de toute oeuvre, mais reconnaître néanmoins le rôle qu'il peut y jouer. Rôle qui ne s'assume jamais en tant que tel, dont la présence est ressentie sans jamais qu'elle ne se livre tout à fait. Ici encore, le silence semble se dérober.


La parole actuelle courant toujours après le silence, voulant le faire parler et donc l'anéantir -suprême garantie- ne cesse de le faire fuir. Peut-être n'a-t-elle qu'à le laisser être, à ses côtés. En effet, si la parole veut contraindre le silence comment pourra-t-elle le comprendre ? Surtout si elle n'a à lui proposer que des mots, lui qui ne les a jamais utilisé, qui les a sans cesse condamnés à l'échec. Pour appréhender son instance contraire, le langage ne trouvera pas de solution, en ne lui proposant seulement que de se soumettre à son modèle. Laisser le silence s'exprimer, une dernière fois, selon ses termes, est peut-être l'ultime chance pour la parole moderne de se guérir de sa surdité.


2 commentaires:

Anonyme a dit…

Dans la philosophie Zen, le silence est la seule alternative pour ne trahir le réel ...Toute parole ne peut que décrire le monde qu'imparfaitement, d'où, le recours au silence ... Radicale alternative !

Aurélien-Alexandre Debord a dit…

A ce propos, même si on dérive de l'article, il est intéressant de noter la réception qu'eut la pensée de Heidegger au Japon. En effet, avec ta remarque, on comprend bien la réception qu'a pu avoir un ouvrage comme Acheminement vers la parole.